Comment une institution aussi solide que l'Église catholique en est-elle venue à défendre son dogme au prix des innombrables condamnations à mort qui jalonnèrent son histoire ? Ce dogme, certes, elle eut bien du mal à l'élaborer, de concile en concile, face à des « sectes » hâtivement déclarées hérétiques dès qu'elles s'avisaient de mettre en cause la fragile construction de la Trinité. Partant, si les premiers temps de son existence virent les papes multiplier les « simples » excommunications, se mit bientôt en place, avec le concile Latran IV (1215), une arme de guerre antihérétique d'une redoutable efficacité, la Sainte Inquisition, qui fit merveille notamment contre les « Parfaits » cathares.

La Renaissance, censée représenter une modernisation des esprits, fut loin de ralentir la répression contre des « hérétiques » souvent de haute volée, comme Jan Hus et Jérôme de Prague en Bohême, Savonarole à Florence, le libraire Étienne Dolet à Paris, le carme Vanini à Toulouse, Giordano Bruno à Rome... et tant d'autres, comme eux décapités, noyés, pendus et/ou brûlés.

Jean-Yves Boriaud raconte la naissance et les progrès de l'idée d'hérésie, et examine les mécanismes mis en jeu pour rendre patent et aggraver ce péché mortel : diabolisation du dissident, assimilation de sa déviance à de la sorcellerie ou à des pratiques réputées criminelles... Le spectacle même de son châtiment, soigneusement mis en scène, devait dissuader les foules spectatrices de tomber dans son infernale erreur.

Un ouvrage original et édifiant, appelé à devenir un classique.